Apprendre sans l’école : ça marche ?

Avec la permission de l’auteur, je partage ce témoignage de Aurélie Jouan dont les enfants n’allaient pas à l’école pendant un long long temps.

Bonjour à vous,

Deux de mes enfants étant (re)partis à l’école après 10 ans de unschooling, je me dis que certains parents, comme ça aurait été le cas pour moi à l’époque, seraient contents d’avoir un retour d’expérience.

Je me permets donc de partager une publication que j’ai faite récemment sur mon profil FB.

Enjoy !

Quand nous nous sommes lancés dans la grande aventure de l’instruction en famille en 2008, leur papa et moi, nous n’avions pas d’attente spécifique concernant nos enfants …

ALORS, CA MARCHE ?

Nous ne les avons pas sortis de l’école pour qu’ils aient un meilleur niveau scolaire.

Nous ne les avons pas sortis de l’école parce qu’ils étaient dyslexiques / haut potentiel / TDAH / autistes…

Nous ne les avons pas sortis de l’école par réactionnisme au système scolaire…

(N.B: Toutes ces raisons pour pratiquer l’IEF sont hautement entendables et souvent recommandables).

Nous les avons sortis de l’école car nous avions envie et l’opportunité de leur/nous offrir cette expérience du “hors piste”, du plus lent, du “autrement”.

Mais quand on fait du “hors piste”, quand on choisit de sortir des sentiers battus, de l’ “Autoroute”, on se confronte en général aux peurs et interrogations de notre entourage, aux questions du type “Ca marche ton truc ?”…

Et dans la multitude des peurs qu’on nous a fait remonter pendant ces 14 ans d’expérience, une seule est venue frapper à la porte de ma conscience régulièrement, et surtout au fur et à mesure que les enfants prenaient de l’âge :

“Et si ce choix faisait perdre des opportunités à nos enfants ?

Et s’ils n’arrivaient pas à “réussir” dans la vie ?”

Car je précise que nous avons choisi, par affinité philosophique (enfin surtout moi car le papa était moins à l’aise au départ) et préférence relationnelle (un des choix de l’IEF était de ne pas me prendre la tête sur les devoirs avec mes enfants, alors jouer à la maîtresse non merci !) de pratiquer l’instruction informelle.

L’instruction informelle, pour ceux qui ne connaissent pas, c’est la possibilité pour les enfants de suivre leurs élans du moment, c’est l’école de la vie, ou devrais-je dire l’ “école DANS la vie”, bref, c’est les grandes vacances perpétuelles !

C’est également l’apprentissage qu’on pratique en tant qu’adulte dans notre quotidien depuis qu’on est sortis de l’école finalement…

C’est entre autre… (toutes ces situations sont tirées de mon expérience familiale) :

  • Apprendre à lire en commençant par les panneaux signalétiques,
  • Bosser les maths en gérant son argent de poche et traquer les fractions en faisant les soldes,
  • Utiliser le théorème de Pythagore pour construire une cabane en palettes,
  • Passer 3h à observer une fourmilière
  • Se passionner pour la forge et la coutellerie et fabriquer des couteaux semi pros de ses 11 à ses 13 ans et arrêter du jour au lendemain comme ça avait commencé…

Mais c’est aussi…

  • Ne pas savoir quel est leur niveau « scolaire » car ils ne sont pas testés et découvrir qu’ils maîtrisent la lecture au détour d’un contrôle pédagogique,
  • Les regarder ne rien faire du tout pendant parfois des semaines entières
  • Les écouter argumenter qu’on apprend l’anglais quand on joue à Minecraft…

Tu comprendras donc que l’apprentissage informel est trèèèès inconfortable pour les parents, surtout quand tu as été élevé dans l’idée que la réussite sociale et professionnelle passe automatiquement par la sacro sainte école.

Et oui, l’entourage et la Matrice te ressassent bien cela de façon continue alors tu ne risque pas de l’oublier… => “Sans école, pas de futur !”

Autant j’ai beaucoup lu plein de livres sur l’apprentissage informel écrit par des parents expérimentés d’enfants devenus adultes, des pédagogues (Holt pour ne citer que lui) pour me rassurer que nous ne faisions pas n’importe quoi, autant je n’ai pas réussi à me débarrasser totalement de cette dernière peur…

Alors quand mes 2 garçons (n°2 et 3) sont finalement allés à l’école à leurs 15 ans respectifs après 14 ans d’informel j’ai, comment dire… “Serré les fesses”…

Eux qui n’avaient jamais mis les pieds à l’école (ou si peu pour le plus grand qui a quitté à 4 ans) et n’avaient quasiment jamais ouvert un manuel scolaire, ont réintégré le collège en 3ème en cours d’année (octobre pour l’un et janvier pour l’autre).

==> Verdict :

Réintégration sociale : tout nickel !

Remise à niveau : 2 mois en moyenne puis passés 1ers de leur classe.

Brevet : eu à chaque fois avec mention très bien !!

Petit plus : moyenne de 20/20 en anglais !!! (merci Minecraft et les visiteurs Workaways avec qui je conversais en anglais)

Ce résultat bluffant je ne m’y attendais même pas !

Je n’y attache pas beaucoup plus d’importance qu’eux mêmes ne le font.

Pour eux ce n’est pas une réussite, c’EST juste.

N’ayant pas été élevés dans la recherche de réussite sociale, ils avancent en toute légèreté et gardent leurs “réussites” comme des faits objectifs et n’en tirent aucune émotion ou faire valoir. Finalement c’est plus moi qui déploie ces mentions comme un étendard auprès des amis et de la famille car moi je porte encore ce besoin de reconnaissance sociale acquis de ma longue scolarité (hum il va falloir que je nettoie ce point qui a tendance à s’accrocher – hop une auto séance de libération émotionnelle )

Mes enfants sont souvent des maîtres et des guides pour moi !)

Je ne me sens pas fière pour autant de mon travail de parent.

Je suis juste fière d’avoir pu me faire confiance dans mes ressentis, d’avoir fait confiance dans la toute puissance de mes enfants, d’avoir travaillé sur mes peurs pour ne pas leur transmettre et les bloquer dans leur évolution personnelle…

Pour cela je suis fière !

Je suis contente également de mes choix…

Je suis contente d’avoir économisé” à mes enfants des heures d’immobilité et d’ennui sur les bancs de l’école (et je sais de quoi je parle avec mon bac +4).

Je suis contente de leur avoir offert la chance de se réveiller à l’heure où leur corps était reposé et de se coucher à l’heure où leur corps était fatigué.

Je suis contente de leur avoir permis de passer beeeaucoup de temps avec leurs parents tant que leur état d’enfant le leur réclamait.

Je suis contente aujourd’hui de te partager ce témoignage.